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Il est mort de réflexion

18 mars 2014 at 13 h 52 min

Mercredi après midi, Joël est revenu plus tôt que d’habitude à la Cour. « Je vais au quartier. Nous avons appris que mon vieux voisin, de plus de 80 ans, est décédé ».
Décidément, les anciens passent une sale période avec tout ce qui arrive dans la vie des quartiers ces derniers mois : la compression des familles, qui accueillent un plus grand nombre de personnes en leur sein, les difficultés d’approvisionnement, la privation de mouvement et de communications, etc.. Samedi dernier, un ami du mouvement enterrait sa grand-mère, à Sica 2, tout près. Le même jour, un autre ami perdait son grand-père de 70 ans.
Joël, ce mercredi, prend vite fait quelques restes du repas gardés pour lui, et s’en va « donner un coup de main pour les préparatifs ». Nous le reverrons passer le lendemain matin, pour se changer et partir au travail. Le soir du jeudi, il repart vers son quartier. Il explique :
« Nous avons préparé hier la sépulture, et enterré le corps dans un bel endroit de la concession, derrière la maison. En effet, presque plus personne ne peut aller enterrer ses morts dans les cimetières à cause de tous les problèmes ! Trouver un véhicule, aller en sécurité, creuser la tombe, amener des outils… : tout est problématique. On s’est retrouvé avec les mêmes voisins que ceux du mois dernier, quand notre vieux avait été cambriolé. Il avait eu la visite de quatre hommes, la nuit, qui avaient tout emporté de chez lui. Il était resté plié et effrayé dans un coin de sa pièce en voyant tout partir, même ses tabourets et sa marmite ! Avec ces mêmes voisins, on l’avait aidé le matin à rassembler des ustensiles, un tabouret, et on avait réparé sa porte avec des morceaux de bois et des clous. Il y avait même des soldats MISCA congolais qui avaient apporté des paumelles et des clous pour nous aider ! » (….)

Réflexions d’un travailleur social centrafricain sur l’action humanitaire …

16 mars 2014 at 22 h 31 min

… Que l’aide humanitaire nous considère comme des êtres humains et pas que des « bénéficiaires ». 

Dans le centre communautaire dans un quartier de Bangui où je travaille, je vois les interventions des organisations humanitaires et leurs conséquences concrètes.

C’est en premier lieu l’impression que toutes ces ONG humanitaires interviennent n’importe comment, dans tous les sens. Motivées, c’est vrai, pour porter secours et améliorer le sort de personnes frappées par ces événements terribles.

Mais nous qui travaillons avec des jeunes qui vivent et souffrent cette situation précaire, des jeunes qui n’ont aucun lieu de refuge sinon le centre où nous sommes, où ils parviennent souvent épuisés, nous faisons un autre constat. Nous sentons combien ils ont aussi besoin d’un soutien moral, physique mais aussi besoin d’humanité.

J’en ai vu passer des « humanitaires ». Et plusieurs! Ils font des promesses mais qu’ils ne tiennent pas. Ou alors c’est tellement long et lent… Alors cela nous décourage. Certains, on ne les a jamais revus. Donner, c’est nécessaire, encore faut-il s’organiser pour cela. Nous n’avons pas le sentiment d’être respectés en tant qu’êtres humains ni reconnus en tant que structure organisée. Ces humanitaires passent outre, ils agissent selon leur propre point de vue, font comme ils le veulent et ne tiennent pas compte des avis des responsables locaux en charge du centre communautaire.

Et cela fait des dégâts. L’exemple typique est celui d’humanitaires qui ont voulu donner de l’huile et du riz, et ont suscité un problème très grave avec les enfants.

Au lieu de confier leur don à notre équipe, ils ont voulu effectuer la distribution eux-mêmes. Ils ont fait des portions individuelles pour chaque enfant. Cela a pris beaucoup de temps, et cela a créé de l’énervement parmi les enfants et les jeunes obligés d’attendre. Nous avons du faire face à cela. Mais ce qui semblait compter pour les membres de l’organisation humanitaire, c’était surtout de pouvoir faire des photos de chaque enfant recevant son colis.

Faute de bois pour pouvoir cuisiner, plusieurs enfants sont allés vendre le riz qu’on venait de leur distribuer.

Distribuer sans réfléchir, c’est sans suite. C’est le contraire de ce que nous essayons de faire au centre avec les enfants. Cela nous pose de graves problèmes dans notre travail.

Pourquoi faut-il réfléchir au suivi ? Cette réflexion est essentielle à nos yeux. Quand on distribue de la nourriture et des moustiquaires à des personnes livrées à elles-mêmes : quelles sont les conséquences ? Quel suivi les organisations humanitaires envisagent-elles ? Quel prolongement à ces actions  de distribution pourrait être envisagé ? Quand la crise sera finie et que la stabilité reviendra, tout le monde repartira. De telles actions humanitaires dans l’urgence se limitent à : on vient tout de suite, on court, on distribue et on repart, en laissant les gens dans leur situation.

Je crois qu’il faudrait que l’humanitaire crée quelque chose de très solide, mette en place un accompagnement qui permette ensuite aux gens de faire leur propre avancée.

Pour moi, cette crise politico-militaire qui a surgi, nous savons qu’elle reviendra si on ne cherche pas de solution durable. Face à cela, il faut que tous s’assoient et se parlent pour imaginer une solution durable, entre gouvernement, humanitaires et société civile.

Il ne faut pas se limiter à distribuer de la nourriture et des habits, mais s’asseoir ensemble pour discuter et créer les conditions d’un partenariat qui construira la solution.

Quand nous voyons tous ces humanitaires qui s’émeuvent et qui viennent nous soutenir,  comprennent-ils que c’est aussi leur façon de donner qui nous décourage ?

C’est cette façon de donner qui n’est pas la bonne : car alors ces personnes ne sont plus considérées comme des êtres humains mais comme des « bénéficiaires ». Alors faut-il s’étonner que tout ce qui a été distribué se retrouve ensuite sur le marché ?

Il faut aussi que les hommes politiques s’assoient avec nous, nous parlent. Pourquoi y a-t-il tant de haine ? Le rôle des organismes humanitaires devrait être aussi d’aider à cette concertation entre tous. Eux aussi doivent prendre le temps de s’asseoir et de réfléchir avec les gens du pays, et de manière collégiale. Mais ils n’écoutent pas. Ils agissent chacun de leur côté. Même entre eux ils ne s’entendent pas.

Voilà ce que je pense par rapport à l’intervention humanitaire dans mon pays. Il faut que l’action humanitaire ne soit plus une œuvre charitable mais bien le fruit d’une réflexion partagée.

Entre Bangui et Bouaké (Côte d’Ivoire) au son du djembé…

2 mars 2014 at 11 h 12 min

Samedi. Alors que le groupe ATD Quart Monde de Bouaké (Cote d’Ivoire) se réunissait pour marquer l’anniversaire de la mort de Joseph Wresinski, une liaison par Skype a permis aux deux groupes ATD Quart Monde de Bangui et de Bouaké (Côte d’Ivoire) d’échanger directement entre eux.

Répondant aux amis ivoiriens qui les interrogeaient sur l’importance de cette journée, l’équipe de Bangui répond: « Partout où on est, on porte en nous le mouvement du père Joseph. C’est à nous de nous engager dans ce sens pour nous rapprocher des plus pauvres, de ceux qui vivent dans la précarité, afin qu’ils ne se sentent pas isolés.

Deux enfants de Bangui ont récité des poèmes. A Bouaké, Daouda a pris son djembé et pendant plusieurs minutes tout le monde a dansé à Bangui sur son rythme, enfants comme adultes.

L’expérience récente de la Côte d’Ivoire qui, elle aussi à travers la violence, a fait dire à Djakaridja ces mots d’encouragement : «  Chez nous ça a duré 10 ans. Mais on s’est organisé et on s’est relevé ». Cette phrase a eu un impact très fort sur les amis de Bangui. L’une des membres de l’équipe centrafricaine l’a commentée : « Ils ont raison on doit s’organiser. Sinon comment va t on s’en sortir ? Comment le pays va progresser ? Nous devons faire quelque chose pour désarmer l’esprit des choses. »

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Le droit d’être un homme: Hommage à Joseph Wresinski

2 mars 2014 at 11 h 05 min

Vendredi 14 février 2014, alors que le soir est tombé, nous nous réunissons à la Cour. La coupure d’électricité a calmé tout le quartier. Gisèle donne le signal du commencement de notre « Hommage à Joseph Wresinski », fondateur d’ATD Quart Monde dont c’est l’anniversaire de la mort ce jour là. Elle nous demande de nous mettre debout pour une minute de silence.

Ce rassemblement est d’autant plus important que Bangui vit depuis des mois au cœur de la violence. Les membres, amis et alliés d’ATD Quart Monde y songent en cet instant, à la fois sur ce qu’ils ont vécu et vers ce quoi ils s’acheminent. La plupart sont réfugiés ou ont perdu un proche, un parent, un ami. Craignent de retourner chez eux. Certains habitent la Cour d’autres dans un camp ou chez un parent.

Puis nous lisons les extraits du texte de Joseph Wresinski du 9 novembre 1980. Gisèle lit en Français, Joël traduit paragraphe par paragraphe en Sang.

Le Droit d’être un homme

« Le mouvement nous appelle à créer entre nous la fraternité. C’est-à-dire que l’autre soit vraiment reconnu comme mon égal et que parce que l’autre est reconnu comme mon égal, il a droit de partager avec moi le meilleur de ce que je suis.

La fraternité, c’est la responsabilité commune de partage des uns et des autres.

Aussi, il ne s’agit pas seulement pour nous d’apprendre aux enfants à lire, à écrire ou à compter, ou de faire aimer l’école à travers les bibliothèques de rue. Ce qui nous intéresse, ce n’est pas seulement de rendre les gens curieux, attentifs, de leur donner des méthodes… Il s’agit pour nous de forger l’esprit et le cœur des hommes, et des enfants, et des femmes les plus pauvres. Et de forger en retour notre propre cœur.

Ce qui est important d’apporter aussi bien aux plus pauvres qu’à nous-mêmes, c’est le respect de nous-mêmes et c’est le respect des autres. Introduire les gens dans le savoir, c’est les introduire avant tout dans le respect.

Ce que le mouvement veut, c’est aussi ouvrir à l’espérance. Et l’espérance, c’est que nous croyons vraiment que la misère n’est pas fatale, que la misère sera détruite, qu’elle est un accident dans l’humanité. Car la misère est anti-humaine.

Aucun homme ne peut être étranger sur la terre ! Aucun homme ne doit avoir peur ! Aucun ne doit être inutile ! Et c’est cela que nous devons nous rappeler quand nous entrons quelque part : Est-ce que lorsque je sortirai, ces enfants seront-ils moins étrangers ? Auront-ils moins peur ? Se sentiront-ils plus utiles ?

Alors, à ce moment-là, nous les introduirons dans l’espérance et dans l’amour. »

Michel présente la lampe qui brille au milieu de nous, suspendue au plafond, avec son verre multicolore : c’est une amie volontaire de Suisse, Marie-Rose, qui l’a offert pour l’équipe de RCA. Une maman très pauvre qui vit là-bas récupère des verres jetés, les peint et en fait une lampe. Elle revend ces objets d’artisanat pour faire vivre sa famille.

Puis viennent les enfants qui se placent au milieu de notre cercle et récitent des poèmes qu’ils ont appris à l’école Nicolas Barré. L’école a repris ses activités malgré les dangers. Chaque matin une animation pédagogique est proposée aux enfants qui habitent dans ce quartier.

Ils lisent ces poèmes :

La paix en RCA, lu par Chancelvie (9 ans)

O Centraficaine, O centrafricain

Pourquoi tu as chassé cette paix

de ce beau pays de Barthelemy Boganda

Chrétiens, Musulmans,

arrêtons notre haine

et notre méchanceté

Cultivons l’amour, la tolérance

le pardon et la réconciliation

Nous voulons aller à l’école !

Oh, la paix ! reviens vite nous habiter !

Nous voulons la paix, vite, la paix !

Texte de Monsieur Séverin.

RCA, Pays de Boganda, lu par Christiano (7 ans)

Nous voulons la paix en Centrafrique

Hommes, femmes et enfants,

Chrétiens et Musulmans

vivons ensemble

pour l’avenir de notre pays

Nous avons souffert, lu par Ulrich (6 ans)

Hommes, femmes, enfants

sont décédés

Aujourd’hui

nous voulons la paix

Pour cela il nous faut

la réconciliation

Musulmans et Chrétiens,

vivons ensemble

C’est le pays de Zokwézo.

L’hommage s’achève après avoir applaudi les enfants, en chantant ensemble trois chansons Tapori « Enfant du Monde Tends-moi la main » : « Nous irons jusqu’au bout du monde », Tapori Mama », « Les enfants, porteurs de la paix ». Enfin, nous partageons le chocolat que les amis du Centre International d’ATD Quart Monde nous ont fait parvenir.

Puis nous échangeons les nouvelles de la journée, en nous souvenant des amis de Mpoko, de St Pau, de Combattants, de Moukassa, de Koula-Mandja et de Danzi…

19 février 2014 at 22 h 12 min

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13 février 2014 at 22 h 10 min

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Chanson écrite sur le tableau noir

13 février 2014 at 7 h 06 min

Chanson écrite sur le tableau noir du Maitre Hector, au CM1 de l’école Nicolas Barré, le mercredi 5 février 2014.

Maître Hector fait partie de la promotion de 20 élèves-maîtres de l’ECAC (Enseignement catholique de Centrafrique) qui durant les mois de décembre 2013, janvier et février 2014 se voient dans l’impossibilité de continuer leur formation en « école normale ». Alors avec ses collègues il a accepté de faire cinq semaines d’animations pédagogiques, ouvertes aux enfants de tout le quartier, y compris les enfants « déplacés » qui ne font pas partie de l’école. C’est ainsi que la structure qui accueille d’habitude 400 enfants est remplie de 1500 enfants. Sa classe est, par chance, dans le local en dur, et il l’assure avec son collègue Maître Innocent. Tous deux viennent de l’intérieur du pays, envoyés par leurs écoles de villages pour se former. Coincés à la capitale, Bangui, par le conflit, ils ont bien peu de nouvelles de leurs amis, parents, collègues. Et pourtant, chaque matin, ils sont présents, avec des enfants qui eux aussi ont été rassemblés là par les circonstances et la fuite de leurs parents.

Maître Hector exprime sa pensée dans des poèmes qu’il fait chanter aux enfants. Voici celui d’aujourd’hui.

La RCA pays du rêve

Refrain
La RCA pays des merveilles
La RCA quel beau pays
Pays des rêves et du prodige
Quel beau pays, quel beau pays

 Couplet 1 :
Dans le sous sol plein de richesse
Y’a le diamant et y’a de l’or
y’a le pétrole et le charbon
y’a du ciment et y’a du fer
y’a l’uranium et du mercure
Oh que c’est beau, oh que c’est beau

 Couplet 2 :
Et en surface faune et flore
y’a la forêt et la savane
il y’a les arbres et y’a les herbes
des animaux de toute espèce
Oh que c’est beau, oh que c’est beau

Histoire de fidélité

12 février 2014 at 23 h 27 min

« Nous vivons des choses très dures, mais je ne peux pas rester à terre, il faut que je me relève, sinon qui va relever mes enfants, nos enfants ? » nous confie Joël.

Joël est un grand témoin du Mouvement ATD Quart monde en Centrafrique. Un ami fidèle, pas de temps en temps, mais fidèle toujours et tous les jours … Il a connu ATD Quart Monde en 1988 à travers les enfants qui passaient souvent devant sa maison sur le chemin qui les conduisait à « la Cour aux 100 métiers ». Il participe depuis aux activités lancées par le mouvement. «Nous avons fait une bibliothèque de rue avec les enfants au niveau du quartier Km5 » dit-il. Il ajoute : « cela m’a poussé à réfléchir, à connaître ce qu’est une famille vraiment pauvre. J’ai découvert que d’autres vivaient des situations plus graves que nous, des familles qui se sont recroquevillées dans leur vie, qui se cachent, qui ne veulent pas recevoir les gens. C’est à travers les enfants de la rue que j’ai rencontré leurs parents … »

 La fidélité au cœur, il garde le lien avec les enfants malgré les tragédies que connaît le pays à la fin des années 90. Il les rejoint là où ils se cachent, dans le marché, dans des maisons abandonnées.

 Son engagement l’a amené à travailler ensuite comme éducateur à la Voix du Cœur, une structure qui accueille les enfants se trouvant à la rue.

Depuis le début des violences qui ont repris dans le pays ces derniers mois, et malgré la précarité de sa propre situation, Joël n’a pas cessé d’aller à la Voix du Cœur, parce que ces enfants aussi font partie de sa famille. Au lieu des 45 qui y sont habituellement accueillis, il y retrouve plus de 400 enfants et adolescents, sous la protection des deux seuls gardiens. Ils ont trouvé là un semblant de sécurité quand en ville, le pire est possible.

Tout manque. Joël contacte et accueille des représentants d’ONG, des organismes, des ambassades. Il parvient à obtenir de la nourriture, des bâches, des tentes, pour que les enfants aient à manger et où dormir. Il souffre quand ces distributions sont faites dans des conditions qui ne mettent pas les enfants à l’honneur. Joël travaille presque tous les jours. Et après le travail, il marche des kilomètres pour aller voir ses filles, qu’il a mises en sécurité chez des parents dans un autre quartier. Il est infatigable et fidèle.

 Un dimanche, mi janvier, alors que nous prenions tous ensemble le café du matin, Joël se prépare pour aller au culte. On l’appelle au téléphone. Des jeunes ont ramené à la Voix du Cœur, dans une brouette, le corps d’un de leurs camarades. Joël se précipite, pour faire en sorte que le corps soit porté à la morgue, comme tant d’autres. Toute la journée Joël est là, à rechercher la famille de ce jeune. C’est lui qui fait les démarches administratives, qui essaie de comprendre ce qui s’est passé. Il explique: « nous avons découvert que sa famille était toute proche à quelques rues de la Voix du Cœur. Son père n’avait plus vu son fils depuis 20 ans, il était parti à l’âge de 5 ans. C’est sa grande soeur qui a recouvert le corps de son pagne. Les autres jeunes sont venus nombreux les rejoindre ».

On raconte que le jeune aurait été abattu parce qu’il avait pillé. Joël découvre qu’en fait, il a été tué stupidement par une personne armée, comme cela, gratuitement, sans même qu’il y ait eu pillage. Joël veut qu’on respecte le jeune décédé. Il veut calmer ses amis. Ce n’est pas facile, car ils ont la vengeance en eux, leur camarade a été tué. Joël n’arrivera pas à les contenir tous. Le commerce appartenant à l’auteur du coup de feu sera pillé. Joël déplore : « Comment faire pour que ces jeunes aient un avenir autre que reproduire la violence qu’ils ont subie ? ».

 

“Assurer que chaque citoyen sera reconnu comme Centrafricain à part entière”

10 février 2014 at 21 h 34 min

lingua-plainlogo 2Mme Béatrice Epaye est une ancienne députée et aujourd’hui membre du Conseil national de transition de la République Centrafricaine et qui aujourd’hui siège au Parlement de la CEMAC, à Malabo en Guinée Equatoriale, où elle représente le CNT centrafricain. Mme Epaye est aussi la Présidente de la Fondation “La Voix du Coeur”, qui est actuellement un lieu d’accueil et de soutien aux enfants des rues à Bangui, capitale de la Centrafrique. Mme Epaye a accepté de répondre à nos questions sur la situation en Centrafrique à ce jour et les mesures à prendre pour éviter une catastrophe humaine dans son pays :

beatrice-emilie-epaye

  Dans votre localité, quelle est la situation a ce jour ?

 BE: Je suis une habitante de Bangui la capitale de la RCA, une ville meurtrie par le conflit. Tous les jours, de chez moi, j’entends des coups de feu venus de certains quartiers de Bangui. Ma maison comme beaucoup d’autres accueillent des proches venus de quartiers plus fragiles. Les gens fuient et beaucoup se sont regroupés dans des lieux qu’ils estiment sécurisés : aéroport, mosquées, églises, dans des familles, en brousse, dans la périphérie de Bangui ou en République Démocratique du Congo de l’autre côté du fleuve Oubangui.

De même, le Centre « Voix du Cœur » que j’ai fondé est devenu un lieu de regroupement pour les enfants de la rue en détresse. Là chrétiens et musulmans se côtoient, s’entraident.

  Comment gérez vous les incertitudes et quels sont les besoins les plus pressants à ce jour ?

BE: Effectivement c’est une situation difficile et précaire pour tout le monde : à tout moment le pire peut se produire! Quand on sent le danger, on cherche un abri.

Le plus difficile pour les familles et sur les sites des déplacés, c’est de ne pas avoir à manger ni avoir la possibilité de se soigner. Les salaires ne sont pas payés depuis 4 mois, et l’aide humanitaire n’est pas suffisante, ou même parfois inexistante. Dans leur fuite les populations ont laissé derrière elles le nécessaire pour le quotidien et manquent du minimum pour la survie. Ensuite les enfants ne vont pas à l’école… on en est à un tel point que je ne peux pas le décrire.

Ecouter et respecter les acteurs locaux pour mieux aider la Centrafrique

6 février 2014 at 16 h 21 min

lingua-plainlogo 2

Refugees of the fighting in the Central African Republic via wikipédia Public Domain

 

Les volontaires permanents du Mouvement ATD en Centrafrique ont été présents auprès des plus démunis avant que le violent conflit religieux ne déchire le pays. Leurs actions pour soutenir les populations locales ont permis de maintenir la solidarité et le lien social dans certaines communautés fragilisées par les luttes fratricides. Leurs présences continues auprès des citoyens ont font des acteurs et observateurs privilégiés de la situation actuelle.  Global Voices a sollicité ces volontaires pour connaitre leur points de vue et les actions à mener pour reconstruire le pays; voici la deuxième partie de l’entretien avec Michel Besse et l’équipe de ATD-Quart Monde à Bangui. Vous pouvez lire la première partie de l’entretien ici.

GV: Quelles mesures prises à ce jour avez-vous observées qui ont été le plus utiles à la population ? 

Pendant l’année de plomb qu’à vécu le pays en 2013, une douzaine de membres du Mouvement ATD Quart Monde, sont venus de leurs quartiers et de leurs villages chaque semaine jusqu’au Centre-Ville. Ils ont procédé  à l’élaboration du programme d’action du Mouvement pour 4 ans, exprimer ce qui est le plus important pour leur pays ne pas laisser se perdre l’intelligence des enfants, et rejoindre d’autres qui souffrent plus encore ! Dans un pays ou même le lendemain est incertain, ils ont persévéré et résisté : malgré la pression de l’urgence et des dangers, malgré les incertitudes du présent, pour eux penser l’avenir était important. Ils voulaient semer l’espoir maintenant pour garantir l’avenir et ils continuent.

Vidéo d’enfants à Bangui avec des élèves d’autres pays, RCA.